[caption id="attachment_224058" align="aligncenter" width="800"] Parmi les fruits, les raisins, les clémentines/mandarines et les cerises sont les plus touchés par les pesticides (photo d’illustration Info).[/caption]
Ils sont chimistes, physiciens, microbiologistes, ingénieurs-agronomes, médecins, professeurs… Leur point commun ? Ils appartiennent à l’association Le GREFFE, qui est un Groupe de réflexion et d’information pour un développement durable. A travers une démarche scientifique rigoureuse, ces Auvergnats entendent bien démontrer que l’être humain est en train de faire n’importe quoi. Changement climatique, pollution de l’environnement, épuisement des ressources naturelles, disparition de la biodiversité, inégalités sociales… Le tableau est inquiétant. Exemple symptomatique à travers deux problématiques qui ont défrayé la chronique ces derniers mois.
LES PESTICIDES DANS LES FRUITS ET LEGUMES
Pour étayer leur démonstration, les membres du GREFFE se sont basés sur le rapport publié en février 2018 par l’association Générations Futures et intitulé « Des résidus de pesticides dans les fruits et légumes en France ». Alors qu’un débat s’est élevé sur ce sujet, l’association tient à contester la minimisation des risques pour la santé des consommateurs.
« Ce rapport synthétise les données fiables des plans de surveillance réalisés par la DGCCRF de 2012 à 2016 », cadre Jean-Pierre Jouany, président du Greffe et ancien directeur de recherche à l’INRA. Les résultats montrent que 73 % des 19 fruits et 41 % des 33 légumes analysés contiennent des pesticides dont les teneurs sont quantifiables. Parmi les fruits les plus touchés arrivent en tête les raisins, les clémentines/mandarines et les cerises (près de 90 % des échantillons analysés !). En queue de classement, les kiwis (27 %) et les avocats (23 %). Pour les légumes, les plus pollués sont le céleri branche (84 %), les herbes fraîches (74 %) et les endives (73%).
« L'idée, souvent répandue à tort dans les médias, est que nos aliments n'ont jamais été aussi sains. Nous avons tenu à faire un point scientifique sur ce sujet en précisant que la toxicologie moderne remet en question le concept ancien selon lequel "c'est la dose qui fait le poison" (Paracelse au XVIème siècle). Ce concept est encore fréquemment mis en avant par le milieu médical. D’une part, on sait aujourd'hui que l'intoxication chronique avec de faibles doses répétées dans le temps a des effets délétères graves sur la santé. D’autre part, l'effet "cocktail" des substances signifie qu'un mélange de faibles doses de composés toxiques est plus toxiques que des doses prises séparément », décrit Jean-Pierre Jouanny, pour qui l’utilisation de pesticides par l’agriculture n’a pas réellement diminué au cours des dernières années et ce, malgré le plan Ecophyto-1, qui prévoyait de réduire de moitié leur utilisation entre 2008 et 2018.
« Celui-ci n’a aucune chance d’être respecté. La preuve, l’échéance a été repoussée à 2025. »
[caption id="attachment_224062" align="aligncenter" width="800"] La biodiversité paye un lourd tribut aux activités humaines. Les insectes pollinisateurs comme les abeilles et bourdons sont en grand danger.[/caption]
LA DISPARITION DES ESPECES VEGETALES ET ANIMALES
« Accablant ». Le terme est fort mais il traduit aujourd’hui une triste réalité sur la descente aux enfers de la biodiversité, un phénomène qui a pris corps dans les années 70. Des exemples ? En 2014, le World Wide Fund (WWF) rapportait un déclin de près de 60 % des effectifs de vertébrés sauvages en quatre décennies seulement. Une étude allemande, parue dans la très sérieuse revue Nature en 2017, relate une baisse de 78 % des effectifs d’insectes volants, dont de nombreux pollinisateurs. Cet effondrement a engendré une baisse de 55 % des effectifs d’oiseaux en moins de 25 ans (étude du CNRS de 2018). En cinquante ans, 80 % des lions d’Afrique ont également disparu… Liste non exhaustive il va de soi !
Pour Christian Amblard, chercheur au CNRS, les espèces animales et végétales « disparaissent à une vitesse encore jamais observée depuis l’apparition de la vie sur terre. » Le responsable ? L’homme et ses innombrables activités. Ne cherchez pas ailleurs. Selon les scientifiques, les causes sont multiples. Par ordre décroissant, on retrouve la destruction des habitats (agriculture extensive, industrie d’extraction, déforestation, transports…), la pollution généralisée des écosystèmes, la surexploitation des ressources naturelles, la chasse et le braconnage des espèces, les changements climatiques…
« La biodiversité, c’est à dire l’ensemble des interactions entre toutes les espèces qui vivent sur notre planète, n’est pas qu’un simple sujet d’intérêt pour les scientifiques, les écologistes et les naturalistes, poursuit Gérard Amblard. C’est en effet elle qui permet le fonctionnement de l’ensemble de la biosphère et soutient le développement de toutes les sociétés humaines en fournissant des ressources (aliments, médicaments, matériaux, etc.) et des services comme la régulation du climat, l’épuration de l’eau ou la fertilité des sols. »
Pour les experts du GREFFE, l’effondrement actuel de la biodiversité au niveau mondial revêt la même importance d’urgence que le changement climatique.
« La biodiversité est la seule assurance vie de l’humanité ; préserver la biodiversité, c’est préserver l’avenir de celle-ci », martèlent-t-ils.
[caption id="attachment_224064" align="aligncenter" width="800"] Jean-Pierre Jouanny préside l’association Le GREFFE.[/caption]
UN GRAND PLAN BIODIVERSITE
Pour agir sur cette épineuse problématique, l’ex-ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, a élaboré un grand plan d’actions. Début juillet, pas moins de douze ministères étaient réunis autour du premier Ministre lors de la présentation officielle. 60 mesures visant à mobiliser les pouvoirs publics, les collectivités locales, les ONG, les entreprises et les citoyens ont été dévoilées. Souhaitons simplement que ce plan de bataille, qui s’inscrit sur le moyen terme, ne reste pas lettre morte. François de Rugy, le nouveau ministre de l’écologie, est attendu au tournant. Mais la France ne peut agir seule dans son coin et il faut aujourd’hui une vraie prise de conscience au niveau international. En filigrane se dessine aussi la COP15 de la Convention sur la diversité biologique. Celle-ci se déroulera en Chine dans le courant de l’année 2020.
Contact GREFFE : http://groupe-greffe.wix.com/groupe-greffe /j.jouany@laposte.net
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