Benoît Barrès « Nous voulions parler du Massif central tel qu’il est aujourd’hui »
[caption id="attachment_225207" align="aligncenter" width="578"] Cet éditeur puydômois a sorti 35 livres en 8 ans © DR[/caption] « Page centrale », sa maison d’édition, vient de sortir trois nouveaux ouvrages : « L’Auvergne d’Albert Monier » de Christian Malon et Marie-Hélène Lafon, « Abécédaire passionné de Clermont-Ferrand » de Joseph Vebret et « Massif central, terre d’avenir » de Denis Coudert et Michel Vasset. Quelle est la philosophie de « Page centrale » ? L’idée, c’est de parler du Massif central tel qu’il est aujourd’hui, sous son angle un peu contemporain. Nous voulions éviter d’en parler sous une forme aseptisée, « papier glacé » ou caricaturale. Il s’agissait de montrer ce qui se passe dans le territoire, ce qui est intéressant, sans omettre les difficultés. Le parti pris, c’était de ne pas être trop « régionaliste », trop terroir, de ne pas trop regarder vers le passé, même si quelques ouvrages s’y immiscent. Nous voulions aussi croiser les regards, en faisant travailler des artistes de l’extérieur, en étant dans la création d’aujourd’hui. La première collection, « Carnets du Massif central », était tournée là-dessus. Elle faisait se rencontrer des artistes de l’image et des écrivains, selon le principe que les lieux participent à notre construction, à notre identité. Il s’agit aussi de « penser » le Massif central… En effet. Nous voulions proposer un travail de recherche et de pensées sur le Massif central, et ce dans tous les domaines : la culture, l’environnement… Par exemple, nous avons sorti « L’Auvergne au 21ème siècle » avec des points de vue de paysagistes, de chercheurs, d’industriels, de gestionnaires d’équipements culturels, de politiques. Petit à petit, « Page centrale » a également affiché une vocation de collecteur, de valorisation du patrimoine artistique, littéraire ou photographique. Aujourd’hui, l’entreprise est gérée par ma femme Sylvie Barrès. Je suis simple bénévole. « Page centrale » a vu le jour il y a 8 ans… Quel bilan dressez-vous de ce parcours ? Nous avons sorti 35 livres. C’est pas mal, non ? C’est quand même quelque chose d’extraordinaire de se dire que nous avons contribué à faire émerger tous ces ouvrages avec l’objectif de départ. Comment ont-ils été reçus ? C’est difficile à dire de notre part. Mais j’ai l’impression que nous avons plutôt eu un bon écho d’une certaine frange de population et de lecteurs. En plus, nous nous sommes lancés dans un contexte de mutation évidente, d’évolution des pratiques culturelles, d’arrivée du numérique. Ce n’était pas évident. Auriez-vous fait certaines choses différemment avec du recul ? Forcément. (Il réfléchit) En fait, l’édition est un compromis entre ce qu’on a envie de dire, de montrer, et une logique économique qui vous rattrape. Quand on fait un livre, il faut arriver à en vivre. Il faut donc trouver une forme d’équilibre sans se compromettre. C’est d’autant plus vrai dans les partenariats, que nous voulons développer, parce qu’ils sont indispensables. Vous exercez un autre métier par ailleurs. L’édition, c’était une envie de longue date ? Je voulais créer une activité privée, où je décide tout seul, dans mon coin… Et le challenge économique m’excitait. J’ai réfléchi à différents concepts de création d’entreprise. Mais je ne voulais pas faire du business pour du business. J’avais envie de créer quelque chose qui ait du sens, qui me tenait à cœur depuis longtemps. Et je suis très attaché à cet espace géographique, à la photographie, à la littérature, aux beaux livres, aux arts. En plus, j’en avais un peu marre de ne rien voir de beau ou d’attirant sur l’Auvergne. Toujours ces mêmes trucs sur la cuisine, les paysages… Le livre dont vous êtes le plus fier ? (Il hésite longuement) Sans doute celui sur les affiches en Auvergne. J’ai adoré ce bouquin. Je suis un collectionneur de vieilles cartes postales. J’adore l’illustration. Ce livre a un aspect historique. Il a aussi permis d’assembler des collections éparses ; et de les mettre en perspective par Alain Weill, un spécialiste de l’image. Cela n’avait jamais été fait auparavant. Le deuxième, c’est « Voyage en Auvergne » de Pierre Jourde et Pio Kalinski. Ce livre correspond vraiment ce que je voulais faire. Et ce sont deux grands artistes. Votre actualité ? Nous sortons trois livres. Un « Abécédaire passionné de Clermont-Ferrand » écrit par Joseph Vebret. J’aime beaucoup le principe de l’abécédaire. Le deuxième, c’est « Massif central, terre d’avenir », un ouvrage qui présente onze initiatives innovantes sur le territoire. Le troisième livre est consacré à l’Auvergne d’Albert Monier. C’est le photographe auvergnat qui a le plus vendu en France, qui a démocratisé la photo en faisant des cartes postales et des posters. Il était aussi un grand humaniste. Je me suis vraiment battu pour réaliser ce projet. D’autres envies ? J’ai très envie des développer la collection des abécédaires passionnés sur les villes d’Auvergne. J’aimerais aussi travailler avec les musées, sur des collections d’objets, d’art… Je veux aussi continuer le travail sur les photographes, montrer des choses qui ne l’ont jamais été. Quel regard jetez-vous sur le Massif central d’aujourd’hui ? (Silence) C’est un territoire qui a souffert et qui continue peut-être de souffrir. Mais il se passe quelque chose de vraiment passionnant. Déjà parce que ce territoire a une Histoire très riche. Mais aussi, parce qu’il a un tissu paysager, environnemental, humain ou patrimonial très fort. Ceux qui viennent s’installer semblent contents. Bien sûr, ce n’est pas simple. Mais il y a des solutions intelligentes à trouver. Le Massif central peut prendre sa revanche.
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