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Laurent Wauquiez : « Quand on s’attaque à la communauté juive, on s’attaque à la France »

16h59 - 18 février 2019 - par Info Clermont Métropole

    Le Président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes est venu visiter le 18 février le Centre culturel et pédagogique Jules Isaac de Clermont-Ferrand. Il a rencontré à cette occasion la communauté juive de la ville et est revenu sur les nombreux actes antisémites perpétrés ces dernières semaines dans le pays.        Votre venue à Clermont-Ferrand est symbolique, surtout après les nombreux faits d’antisémitisme que le pays enregistre depuis plusieurs semaines ? Ma venue est évidemment symbolique. Nous sommes à un moment où l’on voit émerger avec de plus en plus de violence, d’agressivité et de haine, de nouvelles formes d’antisémitisme. Nous sommes ici dans un lieu qui a été l’incarnation de la paix, du dialogue entre les religions, avec une personnalité comme Jules Isaac, qui avait plaidé pour le dialogue interreligieux. Personne ne peut rester insensible à ce qui s’est passé ce week-end (à Paris lors de la marche des Gilets Jaunes NDLR). Personne ne peut rester insensible à la montée progressive depuis dix ans, de façon lourde, souterraine, d’un nouvel antisémitisme ; avec son cortège de morts, d’actes terroristes, mais aussi avec son cortège d’humiliations parfois quotidiennes pour la communauté juive. J’ai échangé à Toulouse avec des élèves de Terminale. Il est poignant d’avoir le témoignage d’enfants, de jeunes de cette communauté qui racontent juste le nombre de fois où ils se font traiter de « sales juifs » dans la rue. Tout cela, c’est la vie quotidienne d’une partie des Français sur le sol de la République. Ce n’est pas acceptable. Il y a de mon point de vue beaucoup trop de naïveté de notre part. Le combat contre l’antisémitisme doit reprendre très fortement sa vigueur. Les images que l’on a vu d’Alain Finkielkraut sont d’une violence inouïe. On sent très bien que cela aurait pu dériver, qu’il y a des choses derrière. Quand on dit à quelqu’un qui habite en France, qui est l’un des plus grands intellectuels français : « pars d’ici, la France est à nous », c’est quelque chose que je ne peux pas entendre. Mon déplacement ici avec Brice Hortefeux est à la fois un geste d’amitié, de soutien et c’est aussi un geste de reconnaissance par rapport à la façon pacifiste dont la communauté juive essaye de défendre sa place et son intégration en France. Je ne peux pas considérer comme anodin ce qui est en train de se passer. Tout le monde doit comprendre qu’il s’agit d’un combat au quotidien. Ces lieux comme le centre Isaac, permettant d’accueillir des élèves, sont importants. Ce que l’on doit faire au sein des collèges et lycées est important. Il ne faut plus renoncer ou passer sous silence quoi que ce soit. Nous avons été beaucoup trop naïfs depuis beaucoup trop longtemps. Faut-il faire plus de pédagogie, se montrer plus répressif ? Non, c’est un ensemble de choses. D’abord, tout propos antisémite quel qu’il soit, doit faire l’objet d’une condamnation. Deuxièmement, il faut démanteler tous ceux qui sont des prêcheurs de haine. Il y a des gens en France, sur notre sol, qui prêchent la haine, et que l’on continue à tolérer. C’est l’exemple de l’imam de Toulouse, qui a été mis en examen pour incitation à la haine et propos appelant à tuer les juifs, et bien l’intéressé se trouve toujours en poste et continue à faire des prêches. Un certain nombre de personnes qui ont été placées dans l’entourage du président de la République sont des personnes qui ont eu des propos d’une extrême violence à l’égard de la communauté juive. Est-ce normal ? Il faut traiter l’ensemble. Les attentats contre les juifs ont marqué le retour du terrorisme, c’est avec Ilan Halimi et à l’école Ohr-Tora à Toulouse que les choses ont commencé. Il ne faut pas faire de différence sous le ciel de la République entre les agressions contre la communauté juive et les attentats qui se sont succédé. Quand on s’attaque à la communauté juive, on s’attaque à la France. Quand on s’attaque à la communauté juive, on s’attaque à la République. Cet antisémitisme profite du contexte actuel, notamment des manifestations des Gilets Jaunes pour s’exprimer, faut-il désormais interdire celles-ci ?                        A l’intérieur de ce mouvement, il faut maintenant qu’il y ait un travail très profond de l’ensemble des Gilets Jaunes pour sortir cette violence et cet antisémitisme de leurs rangs. C’est très important que ce soit la communauté des Gilets Jaunes qui s’approprie ce combat. J’ai vu d’ailleurs des témoignages très touchants de certains d’entre eux qui disaient : « on refuse cette installation de la parole antisémite et raciste ». Je ne veux pas que l’on fasse d’amalgame mais je veux aussi que l’on soit très clair. Il y a des choses intolérables et quand on organise une manifestation, il faut faire en sorte que cela ne puisse pas arriver. Soyons tous vigilants, c’est le devoir de tout le monde. Le combat contre l’antisémitisme est une cause commune.

Propos recueillis par J.-P. BOITHIAS

 

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