Quand l'Opéra se laisse toucher du doigt
L'Opéra de Clermont-Ferrand propose aux personnes en situation de handicap ou de déficience visuelle une offre culturelle adaptée. Grâce au toucher et à l'audiodescription, ces spectateurs peuvent profiter du spectacle et de leur passion.
Un opéra, cela se goûte avec tous les sens. Mais quand la vie vous dépossède de ces facultés, il faut trouver des astuces pour vivre le spectacle comme avant. Clermont Auvergne Opéra propose aux personnes en situation de handicap une offre culturelle adaptée, privilégiant l'accessibilité et la sensibilisation à l'Opéra par le toucher et l'audiodescription.
Que ce handicap soit visuel, auditif ou mental, l'Opéra de Clermont propose quatre séances accessibles au prix de 12 euros (20 euros pour les accompagnateurs).
Après « Lucia di Lammermoor » le 16 octobre, ces publics pourront assister à la « Cavalleria rusticana - Pagliacci » le mardi 9 novembre, à « La Sonnambula » le dimanche 23 janvier et aux « Noces de Figaro » le samedi 16 avril.
Sentir la scène
« Cela fait plusieurs années que l'on propose des audiodescriptions explique Rachel Zatla, la responsable des actions culturelles. Nous avons un public fidèle et de plus en plus nombreux. Nous fonctionnons avec l'association AVH Valentin Haüy qui accompagne une vingtaine de personnes. Il y a de la demande. Il y a des places aux premiers rangs de l'orchestre, les spectateurs aiment bien ressentir les vibrations, être au plus près des musiciens, la chaleur de la scène... Nous avons des personnes aveugles ou malvoyantes à des degrés différents. Le fait d'être près, en fonction des ombres et des lumières, des costumes qui bougent, des éléments de décor, cela leur permet de sentir cette présence. »
Le public présent regroupe des gens qui ne connaissaient pas du tout l'Opéra et qui viennent avec les associations mais il y a aussi des mélomanes qui ont eu des problèmes de vue.
Toucher les costumes
Avant le spectacle, une visite tactile est proposée une heure et demie avant la représentation.
« Ils rencontrent le metteur en scène pour restituer l'ambiance et l'histoire explique Rachel Zatla. Il y a aussi un questions-réponses et un temps d'échanges. On leur donne accès aux costumes, ils peuvent parfois les toucher ou toucher des échantillons de tissus. Des planches en PVC avec des photos en grand format sont fournies ou les accompagnateurs décrivent ce qu'ils voient. Il y a aussi des programmes en braille ou en caractère agrandi. »
Ensuite, les spectateurs montent sur scène pour toucher les éléments de décor et les accessoires. « Ils aiment bien ça. Le fait de toucher cela permet d'imaginer, d'avoir des sensations et de bien se rendre compte des dimensions de la scène. »
Lors de la représentation, l'audiodescription et les autres sens prennent le relais. Accès culture, une association basée au Théâtre national de la Danse à Chaillot propose une audiodescription dans les spectacles (danse, cirque...) pour plus de 120 théâtres et opéras en France.
L'audiodescription précise bien comment sont habillés les acteurs, les coloris, les matières des décors et des costumes. C'est très approfondi.
L'agence fournit les casques avec un boîtier pour régler le volume. L'audiodescription est faite en direct, les bandes-son sont lancées et quand les chanteurs opèrent, le silence se fait.
Mais l'audiodescripteur s'adapte en direct et enrichit la description ce qui se passe si besoin. « Cela va plus loin, il décrit les émotions et il y a le sous-titrage et donne des indices sur ce qui est chanté précise Rachel Zatla. C'est répété en amont et réalisé avec plusieurs voix, féminines et masculines. Il y a différents niveaux de lectures. C'est un gros travail. »
Bernard Gauthier est mal voyant et apprécie amplement ce dispositif mis en place par l'équipe de l'Opéra de Clermont-Ferrand.
« Je l'ai sur ma télé mais à l'Opéra, c'est très bien décrit, on peut se rendre compte des gestes des acteurs, de leur position. Avant le spectacle, on touche les tissus, on perçoit la mise en scène, c'est appréciable. Même la transcription d'un opéra italien en Français est possible, on suit et on écoute les chanteurs. Il n'y a pas d'interférences. On nous précise la gestuelle, l'entrée en scène de tel ou tel côté... C'est très bien ! »
Sa femme Véronique est elle aussi amatrice d'Opéra et le couple peut continuer à se faire plaisir et sortir. « C'est important de pouvoir partager cela. »
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