Une double distinction pour Alexandre Tcherkassov, défenseur des droits humains
Il a fait de sa vie un combat pour les droits humains en Russie, et la ville et l'Université de Clermont souhaitait l'honorer : le 30 mai, Alexandre Tcherkassov était à l'honneur toute une journée à Clermont-Ferrand.
L'ancien président du Centre des droits humains Memorial, organisation non gouvernementale russe lauréate du Prix Nobel de la paix 2022, aux côtés de l'ONG ukrainienne « Center for Civil Liberties » et du défenseur bélarusse des droits humains emprisonné Ales Bialiatski, qui avait pour but de mettre en lumière les millions de victimes de crimes soviétiques et dissoute en 2021, était présent le 30 mai à Clermont-Ferrand pour recevoir deux distinctions.
Memorial a notamment documenté les violations des droits humains commises dans la égion du Caucase du Nord et en Tchétchénie au fil des deux guerres (1994-1996 ; 1999-2009) tout en conduisant un monitoring précis sur la situation des prisonniers politiques en Russie.
Classées par le Kremlin « agents de l'étranger », une étiquette infamante destinée à présenter à l'opinion publique russe des « traîtres de l'intérieur » supposément à la solde de l'Occident, deux organisations phares de Memorial ont été dissoutes par les autorités russes le 28 décembre 2021, peu avant l'invasion massive de l'Ukraine. Cette dissolution et l'accélération de la répression en Russie ont contraint Alexandre Tcherkassov à quitter de Russie en juin 2022. Le 30 mai, Alexandre Tcherkassov a été fait citoyen d'honneur de la ville de Clermont-Ferrand, et a reçu le titre honorifique de docteur Honoris Causa de l'Université Clermont Auvergne.
Mais auparavant, il a bien voulu se prêter au jeu des questions avec les journalistes de la ville. Introduit dans un premier temps par Marie-Elisabeth Baudoin, professeure de droit public à l'Université de Clermont, le lauréat du Prix Nobel de la paix 2022 a ensuite pu écouter un discours tout à son honneur de la part de Mathias Bernard.
Discours plein d'humanité
Le président de l'UCA a pu longuement insister sur les valeurs véhiculées par Alexandre Tcherkassov, identiques à celles de l'Université, mais aussi à celles de la ville de Clermont-Ferrand, qu'il a par ailleurs remercié pour son soutien, avant de laisser justement la parole à Jérôme Auslender, adjoint au maire à la ville, en charge notamment des Affaires européennes et des Relations internationales. Ce dernier a lui aussi pris le temps d'honorer la présence de ce fervent défenseur des droits humains, et de rappeler l'engagement de la ville envers l'Ukraine, notamment via des dispositifs d'aide d'urgence. C'était alors au tour d'Alexandre Tcherkassov de prendre la parole. Il a commencé son discours en s'excusant pour son français « digne d'un crime de guerre », assez ironiquement.
Son discours a été bien évidemment centré sur son engagement depuis plus de 30 ans pour les droits humains dans les pays en guerre, en particulier son combat le plus récent en Ukraine, et a surtout fini en insistant sur le fait qu'un état qui viole les droits humains dans son propre territoire ne pouvait être qu'une menace pour la paix dans le monde.
Ensuite, la phase des questions lui a permis d'ajouter de nouvelles précisions, notamment sur le rôle de l'Europe dans cette guerre, qui doit soutenir l'Ukraine de par les valeurs qu'elle a en commun avec l'Europe, mais aussi sur sa propre sécurité en France ou bien sur la durée de la guerre. Cependant, selon lui, il n'y a que deux issues possibles : « soit c'est Poutine qui arrête l'invasion, et c'est la fin de la guerre, soit c'est Zelensky qui l'arrête, et c'est la fin de l'Ukraine ».
Il a fini cet échange en parlant du rôle des étudiants, et du travail qu'il y aurait à faire avec eux après-guerre, qui sera pour lui extrêmement important pour pérenniser la paix et éviter les récidives après une fin de conflit.
Antoine MOYEN
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