Laurent Vigneron, aux racines de la viticulture
Issu d'une famille passionnée par l'art du vin, Laurent Vigneron est producteur notamment de vin AOP Côte d'Auvergne Madargue, une cuvée issue de vignes pures cépage gamay, plantées sur la commune de Riom et Saint-Bonnet-près-Riom. Il nous a reçus sur sa petite mais brillante exploitation où il applique un savoir-faire lentement acquis au fil de ses rencontres.
Il y a des après-midi d'automne plus lumineux que d'autres. Partir à la rencontre des hommes et des femmes qui aiment leur métier et savent le partager est toujours un privilège. Laurent Vigneron, viticulteur à Saint-Bonnet-près-Riom et Riom nous a ouvert les « portes » ensoleillées de ses vignes, sur les coteaux de Saint-Bonnet avec, au choix comme paysages, Riom, le puy-de-Dôme ou la chaîne des puys. « C'est vrai qu'il y a des bureaux moins agréables » nous avouait Laurent Vigneron.
Au milieu de ses vignes, où le désherbage chimique est banni, il nous raconte son métier, sa passion.
Au cœur de notre terroir, Laurent Vigneron travaille la vigne sur trois parcelles : les coteaux de Chalucet, les Groslières et le Plantier. Il y produit les cuvées de vin rouge Anthologie (100 % gamay, AOP Côte d'Auvergne Madargue) et Allégorie (100 % pinot noir) ainsi que les Larmes de Cypris en rosé, réalisé avec les deux cépages.
« Ici nous sommes sur l'aire d'appellation Madargue sur la commune de Riom. C'est une parcelle qui a une quarantaine d'années et c'est bien car quand les vignes vieillissent, elles plongent vraiment très profond et se nourrissent du terroir. C'est là que l'on obtient les caractéristiques typiques du terroir de Madargue. On est sur un sol sableux et c'est le seul cru, et l'un des rares endroits du Puy-de-Dôme, qui n'est pas volcanique. C'est étonnant alors qu'ici tout le relief a été façonné par les volcans mais ici nous n'avons pas de coulée de lave, pas de basalte, pas de pierre ponce, pas de pouzzolane... on est en bordure des puys, sur l'ancien lac de Limagne du temps où les volcans n'existaient même pas. »
« À Beaune, j'ai découvert la haute couture du vin »
Petit-fils et neveu de vigneron, Laurent était fait pour ce métier, cette vocation. Bernard Boulin, son oncle, était un vigneron reconnu de Madargue dans les années 80-90 et même 2000. « Une pointure des vins auvergnats déjà très novateur pour son époque. Il a permis de passer le vignoble en AOC à l'époque et on l'a eu depuis 2011. Tout un chemin avait été tracé bien avant. Mon grand-père, George Boulin faisait, lui, des vignes pour son plaisir. »
Il en parle avec bonheur. « C'est une passion familiale. À la fin du collège, je savais que c'était ça que je voulais faire. Cela me motivait beaucoup. J'allais dans les vignes de mon grand-père tout petit et à l'adolescence chez mon oncle qui était professionnel, cela m'avait toujours plu. Je voulais faire ça alors, je suis parti en seconde au lycée viticole de Beaune en Bourgogne jusqu'en BTS en 1999. J'avais trouvé ma voie, je me suis éclaté avec cette passion. »
À l'école bourguignonne
En Bourgogne, il a appris beaucoup sur le pinot noir. « Un cépage que j'adore. J'ai appris ce qu'était la précision, j'ai approché ce qu'était la haute couture du vin. La Bourgogne, c'est pour moi le plus grand vignoble en termes de pinot noir. Dans les grands bourgognes que j'ai eu la chance de côtoyer et de goûter, être au cœur de ça à l'époque, on touche du doigt ce qu'est la haute précision sur la culture de la vigne et en vinification. Ce sont des supers grands et en agronomie j'ai rencontré des pointures comme Claude Bourguignon. »
Lui, l'Auvergnat que l'on regardait un peu de haut là-bas, a pendant six ans fait ses classes et ses preuves dans un milieu très élitiste. « C'est le seul revers de la médaille quand on a 15 ans et que l'on arrive là-bas. Ce n'est pas facile mais il y a un grand savoir et c'est passionnant. J'aimerais toucher du doigt leur technicité sans perdre le côté paysan de notre métier. »
Là-bas il s'est également fait des amis pour la vie, des vignerons avec qui il peut échanger sur son métier et ses problématiques.
Après Beaune, Laurent Vigneron a travaillé dans le Mâconnais et dans une coopérative dans le Beaujolais, mais aussi dans un beau domaine en Provence, plus axé sur le rosé.
Fin 2001, après ce beau voyage, il est revenu en Auvergne malgré une belle offre en Provence. « Je suis revenu travailler avec mon oncle Bernard Boulin dans l'idée de m'installer. On a travaillé ensemble pendant trois ans puis je suis allé travailler chez Pierre Goigoux à Châteaugay. »
En 2019, c'est le grand saut ! Après avoir mûri son projet, il se lance dans l'aventure près de vingt ans après son retour sur ses terres. Laurent Vigneron a racheté certaines parcelles pour se lancer seul et appliquer son savoir et sa philosophie sur une petite exploitation à laquelle il laisse le temps d'exprimer tout son potentiel.
« Je fais du vin depuis toujours mais là c'était l'opportunité de faire du vin seul. J'en ai repris sur les Groslières... En 2022, je me suis mis à vinifier. Puis j'ai planté un demi-hectare de vignes en 2022, puis un autre bout de l'autre côté et j'ai d'autres projets de plantation. J'aimerais avoir un petit peu de blanc à la carte, planter de la Marsanne ou de la Roussane sur la commune de Cellule. Car Madargue est un super terroir pour le rouge. »
Un cépage, un terroir, un climat
C'est un peu la devise de Laurent Vigneron. « Je suis très monocépage, car on a toute l'expression du gamay sur ces sables ou ailleurs dans les argilo-calcaire mais on y tire vraiment toute la personnalité d'un vin. Il y a de belles choses dans les assemblages, ce n'est pas que ce n'est pas bon, loin de là, mais on a des vins qui perdent un peu de leur personnalité. J'aime tirer toute la puissance du gamay sur des terroirs et la finesse du pinot noir en les travaillant comme j'ai appris en Bourgogne, en les travaillant séparés. Une parcelle, un cépage, une cuvée. Il faut essayer de travailler la cuvée au plus proche de la parcelle. Aller au bout du processus. »
Au niveau phytosanitaire il applique seulement un traitement à base de soufre et de cuivre. Pas de produit de synthèse et parfois un peu des produits de bio-contrôle à bases d'écorces d'orange... « Pour renforcer le système immunitaire de la plante. L'idée c'est que plus la plante est équilibrée et en forme, plus elle résiste naturellement. C'est comme chez les humains, si on s'habille bien, que l'on s'alimente bien, on est moins touché. »
« Circuit court »
Bien sûr les passerelles entre le vin et la gastronomie existent sur notre territoire. Et Laurent Vigneron est partisan de ces échanges. « J'essaye de travailler sur la région, je suis sur quelques belles tables, avec des chefs qui aiment bien jouer la carte régionale que ce soit sur les produits ou le vin. Je n'ai pas de gros volumes donc bien travailler localement, c'est déjà un objectif. Je travaille en bio donc ce serait dommage que mes bouteilles partent au bout du monde. Il y a une certaine cohérence à travailler avec des cavistes locaux. »
En 2023, Laurent Vigneron a produit 5 300 bouteilles et pour la récolte 2024, actuellement en cuve, plus de 6 000 bouteilles devraient voir le jour. Un moindre mal avec la météo annuelle.
En prévision des fêtes, c'est sûrement l'occasion d'inviter une ou deux bouteilles de Laurent Vigneron à se joindre à votre table. « Avec un gibier de caractère, on peut partir sur une bouteille de pinot noir Allégorie car c'était une année 2023 très solaire, c'est parfait avouait Laurent Vigneron. Sur un plateau de fromages d'Auvergne, une bouteille de Madargue, et on sera bien. » De la simplicité et de l'authenticité en somme, à l'image de son producteur.
Laurent Vigneron, 11, rue de Châtel-Guyon, 63200 Saint-Bonnet-près-Riom. www.domainelaurentvigneron.fr Tél. 06 09 91 39 02. domainelaurentvigneron@gmail.com
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