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Yann Arthus-Bertrand « On parle quand même de la fin du monde… »

09h32 - 11 décembre 2017 - par Info Clermont Métropole
Yann Arthus-Bertrand  « On parle quand même de la fin du monde… »
- © ACTU_YABERTRAND3

Invité à Clermont-Ferrand par le réseau international des villes Michelin, le photographe et réalisateur Yann Arthus-Bertrand tire la sonnette d’alarme sur l’état de la planète, sans croire à une réelle amélioration. Morceaux choisis. Femmes. « Dans le monde de demain, une des solutions sera de donner plus de pouvoir, ou en tout cas plus de responsabilités, aux femmes. Le Rwanda, où il y a plus de femmes que d’hommes à l’assemblée nationale à cause du génocide, est le pays d’Afrique où la corruption régresse le plus et où l’éducation et les services de santé augmentent le plus. » Tristesse. « Je suis dans une période non pas noire ou désabusée, mais un peu triste. Si vous lisez soigneusement l’appel des 15.000 scientifiques qui a fait la une du Monde il y a quelques jours, on parle quand même de la fin du monde ! Demain, il sera trop tard. On vit tous dans un déni incroyable. On ne veut pas croire ce qui est en train d’arriver… » Croissance « Le problème du monde d’aujourd’hui, c’est cette espèce de croissance incroyable qui épuise les ressources. Mais c’est ce qui fait marcher le monde. Toute notre vie on travaille pour acheter, pour consommer… Et comme nous n’avons pas d’autre solution, on continue. Ça devient une folie. Nous sommes au bout d’un certain système. » Chiffres. « Dans les 50 dernières années, on a perdu 65 % du vivant. La biomasse de vertébrés est composée à 98 % par l’Homme et ses animaux domestiques. Les animaux sauvages, ce n’est que 2 %... Il y a un précipice de chiffres invraisemblable. Aujourd’hui, on parle de la disparition « inévitable » des éléphants. C’est écrit comme ça par les scientifiques et les journalistes. Ils étaient 20 millions au début du siècle, ils sont 350.000 aujourd’hui. On en perd 10 % tous les ans. Au bout de 20 minutes ici, on aura tué un éléphant en Afrique. Jamais je n’aurais pensé ça… Et ça va très très vite. » Trop tard ? « Il est trop tard pour être pessimiste. Comment est-ce qu’on va faire ? Mon travail, c’est de transformer cet aveu de détresse ou de désespérance en action. Il faut faire. On n’est pas là pour regarder le monde : on a tous une mission sur Terre. Et ce n’est pas ridicule de penser que cette mission est importante. » Politique. « Plus ça va, plus je pense qu’on a les hommes politiques qu’on mérite. Ils font ce qu’ils peuvent. Mais en démocratie, c’est nous qui décidons de ce qui va se passer. Il n’y a pas de lobbies qui nous obligent à acheter ce qu’on n’a pas envie d’acheter. C’est une décision personnelle. » Glyphosate. « Je regarde le monde les yeux ouverts. C’est un monde où on est train de vider la mer, de faire disparaitre la biodiversité… L’histoire des glyphosates, c’est incroyable. Je ne comprends même pas. En 1980, les apiculteurs français produisaient 32.000 tonnes de miel sur les 40.000 qu’on consomme. Aujourd’hui, c’est 8.000 tonnes… On va vers un monde difficile et compliqué. En Allemagne, 80 % des insectes ont disparu ! Aujourd’hui, nos parebrises sont propres. Avec les pesticides, cette biodiversité a disparu. » Viande. « Je suis devenu végétarien. Il m’a fallu 10 ans. Mais sincèrement, tout écolo qui se respecte devrait le devenir. La viande est en train de détruire la planète. Il faudrait diviser par deux notre consommation. Si on déforeste l’équivalent de la taille de la Belgique chaque année, c’est pour faire de l’agriculture, des céréales qui serviront à 70 ou 80 % à nourrir les animaux. Dans chaque morceau de viande que vous mangez, il y a de la déforestation, des pesticides, des herbicides, du transport, du fioul, de l’eau, de la souffrance animale. Il faut essayer de consommer de la viande responsable et surtout, aider les paysans qui font du bon boulot et accepter de payer des produits un peu plus chers… » Michelin. « Je travaille énormément avec les gens du CAC 40. Ils me donnent de l’argent sans retour d’investissement. Je me sers du capitalisme pour faire mon travail. Et j’en fais partie. Je fais partie de cette génération qui consomme pas mal. Sur l’éthique, la morale, les salariés, Michelin est plus exemplaire que d’autres. Et l’entreprise est restée ici […] Total a demandé à ma Fondation si on pouvait compenser les émissions de carbone de tous ses vols. Du coup BNP va le faire aussi… Cela va nous permettre d’aider près de 50.000 personnes à avoir de l’énergie propre. » Villes. « Les villes peuvent très facilement changer des choses sur le transport, la récupération des déchets, le développement circulaire, les pistes cyclables. C’est beaucoup plus compliqué pour un Etat. Dans le monde, il y a des villes qui font énormément d’efforts sur le développement durable. On dit qu’il y a plus de biodiversité en ville qu’à la campagne. » Avant… « En 2000, personne ne parlait de changement climatique.  Le mot n’existait pas. Un jour, des étudiants sont venus me demander si j’avais pensé aux énergies fossiles que j’avais utilisées pour faire mon travail. Je n’y avais absolument pas pensé. C’est vraiment Al Gore qui le premier en a fait une cause mondiale. Aujourd’hui, les gens qui pensent qu’il ne va rien se passer, que ce n’est rien, sont vraiment des inconscients » Hulot. « Je ne pense pas que Nicolas Hulot soit un homme politique. Je pense qu’il est un écolo. Il fait vraiment un boulot formidable. Mais je l’ai vu il y a deux jours : il m’a dit qu’il était épuisé. Il ne pensait pas que son job serait aussi crevant. Je pense qu’il est vraiment concerné. C’est le meilleur ministre qu’on ait jamais eu… » https://www.youtube.com/watch?v=NNGDj9IeAuI

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