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Joël Mathurin, Préfet du 63 : « contre le trafic, on joue collectif »

06h19 - 02 octobre 2023 - par Guillaume Bonnaure
Joël Mathurin, Préfet du 63 : « contre le trafic, on joue collectif »
Né en Guadeloupe, Joël Mathurin a été préfet de la Nièvre, du Doubs et du Morbihan avant d'intégrer le ministère de l'Intérieur.

Le 26 septembre, Joël Mathurin, le nouveau Préfet du Puy-de-Dôme, prenait ses fonctions et était présenté à la presse. La sécurité, en ville comme sur les routes, le problème de l'eau... le remplaçant du Préfet Philippe Chopin évoque les sujets sensibles.

Comment se fait une mutation dans un nouveau département ?

La passation de pouvoir est excellente, nous avons eu avec le Préfet sortant des moments de briefing et puis j'ai ensuite des moments d'échanges avec les sous-préfets d'arrondissement qui me mettent le pied à l'étrier par rapport aux dossiers. Puis j'ai commencé à échanger avec les élus du territoire, les parlementaires, le maire de Clermont-Ferrand, le président du Conseil départemental pour commencer à rentrer dans les dossiers. Tous les acteurs m'ont bien accompagné donc j'arrive avec un accueil performant. Pour étudier les dossiers, je vais « prendre mon temps avec respect et humilité » comme disent nos ultras marins du Pacifique, pour faire écho à mes précédentes fonctions. Nous nous sommes téléphoné et nous nous sommes vus à Paris. Il m'a laissé un testament aussi. Les choses se passent très bien. Nous sommes dans une logique de continuité de l'État. Le nouveau préfet a son style mais il s'inscrit dans une politique publique avec des priorités du gouvernement territorialisées que l'on appelle une lettre de mission du Préfet. Cette lettre de mission du Préfet Chopin sera désormais ma lettre de mission, ma feuille de route et je m'appuierai sur cette feuille de route pour pouvoir continuer à suivre les dossiers et à accompagner les acteurs du territoire.

Quel est votre premier sentiment en arrivant dans le Puy-de-Dôme ?

C'est un département que je découvre avec intérêt. Le caractère très diversifié ma beaucoup plu. J'ai un tropisme pour le monde rural et agricole, je suis ingénieur agronome de formation. Je serai d'ailleurs présent au Sommet de l'élevage. L'agriculture a toute sa place, les territoires ruraux et de montagne sont très présents. J'accompagnerai ces territoires où il y a une dynamique économique, de développement urbain et métropolitain avec Clermont Auvergne Métropole. Je suis très attaché à l'égalité des chances, à l'accès aux services publics, aux soins et au numérique dans tous les territoires, en particulier ruraux. Il y a des enjeux très forts et il faudra accompagner nos concitoyens et le premier enjeu, ce sera celui de la sécurité publique au quotidien. Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer nous a demandé de lutter contre les trafics. Ce trafic n'est pas ici à un niveau d'intensité comparable à d'autres mais il nous appartiendra d'être dans une logique de harcèlement permanent pour que le narco-trafic ne s'installe pas dans notre département et que l'on ne soit pas dans une logique mafieuse ou pré mafieuse. Je serai amené à travailler sur les questions d'urgence.

Lesquelles ?

Je pense notamment à la question de l'eau. Qui touche à la fois nos concitoyens des territoires urbains mais aussi nos agriculteurs et nos industriels. Il conviendra d'avoir les uns avec les autres, une gouvernance partagée de l'eau, une approche patrimoniale de l'eau pour trouver les solutions avec une logique de l'intelligence collective du territoire.

Une solution durable où nous serons en mesure à la fois de faire des économies d'eau, de faire des usages rationnels de l'eau mais en même temps accompagner le monde économique dans sa transition.

Il y a notamment le dossier des bassines qui est un dossier à risque ?

Je crois à l'intelligence des territoires, à cette intelligence collective. L'enjeu c'est de faire partager à l'ensemble des acteurs que nous sommes sur le même territoire. Et donc un territoire que nous aimons. Nous avons tous une légitimité. Le problème, c'est la question de la ressource en eau. Il faut faire en sorte que la souveraineté alimentaire de la France soit au rendez-vous. Le département doit apporter sa réponse à cette question dans un monde instable, pour ne pas être dépendant des autres pays pour se nourrir. Il faut avoir une agriculture qui nourrit la population et en même temps avoir une approche de la sobriété, des logiques de performance en matière environnementale d'utilisation et de réutilisation de l'eau. C'est dans ces approches partagées que l'on doit trouver des solutions et des solutions durables.

Sur les questions d'insécurité notamment dans le quartier de la Gauthière, vous avez prévu de rencontrer le chef de Police, la procureure et le maire de la Ville pour contrer ce trafic ?

C'est un sujet que j'ai déjà abordé avec Mme la Procureure de la République, avec Olivier Bianchi et que nous allons aborder avec les autres maires, je pense au maire de Thiers. L'enjeu c'est de faire en sorte que nous soyons dans une approche de la transversalité y compris entre l'autorité administrative que représente le Préfet et l'autorité judiciaire que représente la Procureure, en lien avec les maires, que nous puissions jouer comme un « pack » de rugby, faire en sorte que sur ces sujets, nous réussissons à mobiliser nos partenaires, je pense aux bailleurs, aux acteurs de terrain comme les services sociaux pour qu'il n'y ait pas un millimètre de terrain sans présence d'acteurs publics et de l'action publique. Ce que je ne permettrai pas, et j'ai formulé des propositions, c'est qu'il y ait des espaces de non-droit ou pire gérés par d'autres, par des systèmes mafieux pour dire les choses.

Dans notre département on agira tous ensemble pour qu'il n'y ait pas de quartier où l'on fasse un contrôle d'identité pour rentrer chez-soi. C'est la sécurité du quotidien. Nous allons être à la manœuvre avec les forces de sécurité intérieure, et je vais très vite sortir avec eux pour que nous puissions montrer que la présence de l'action publique est tout à fait indiscutable, permanente et dans un harcèlement réel. La procureure et le maire m'ont affirmé que les acteurs étaient mobilisés. On joue collectif.

La sécurité routière c'est le point noir pour vous ?

Nous avons des indicateurs qui sont plutôt bons sur le département comme le chômage mais en matière de sécurité routière, les chiffres ne sont pas bons. Au moment où nous nous parlons (le 26 septembre N.D.L.R.) nous avons 9 morts de plus qu'en 2022 à la même époque. En 2022 il y a eu 35 morts et nous en sommes déjà à 44 en 2023.

Comparé à la moyenne nationale, 46 tués sur les routes pour un million d'habitants, nous avons 53 tués pour un million d'habitants dans le Puy-de-Dôme. Ce n'est pas une fatalité, ce sont des drames pour les familles qui ont perdu un être cher, parfois un jeune qui avait toute la vie devant soi. Je suis déjà sur le terrain avec les forces de sécurité intérieure et les acteurs de terrain pour m'attacher à agir en prévention et en répression rapidement, sortir, et montrer qu'il y a du « bleu » sur les routes. Et surtout qu'il y ait une prise de conscience pour faire évoluer les comportements. On peut avec une évolution des comportements, pas dans une logique de « tracasserie » mais dans une logique d'espérance républicaine, faire mieux.

Dans ces décès il y a une sur représentation des motards. Il y a un travail à faire avec les associations ?

Nous aurons un travail de prévention à faire pour ce que l'on appelle les usagers vulnérables de la route (piétons, deux roues...) pour qu'il y ait des actions et d'accompagnement. Avec le schéma départemental de sécurité routière, nous avons un certain nombre de partenaires associatifs que je vais rencontrer pour voir avec eux comment améliorer les actions de prévention. Chacun doit prendre sa part, la prévention c'est important et la répression aussi chaque fois que c'est nécessaire.

Clermont capitale européenne de la culture vous y croyez ?

J'en ai parlé avec le maire et il m'a donné un élément intéressant : ce qui est original dans cette candidature, c'est que c'est une candidature d'un territoire qui fait l'alliance entre le rural et l'urbain. Pas seulement celle de la ville mais aussi celle du Massif central. C'est une démarche originale que personne n'a eue encore et pour ça ils ont trouvé le bon angle.

Enfin, quelles sont vos passions ?

Je tiens à être un bon spectateur sportif. Je serai présent aux matches des équipes clermontoises chaque fois que je pourrai. Je suis aussi un sportif du dimanche et à mon âge, j'ai compris qu'il fallait faire un peu de sport. Et j'ai vu avec intérêt qu'il y avait des pistes cyclables, avec un territoire intéressant et avec les nouvelles applications pour itinéraires à vélo, je vais m'y attacher et cela remplacera très vite mes tours de vélo autour du Golf du Morbihan.

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